Le coût d’un salarié européen varie de 1 à 10

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L’écart de coût entre la main-d’œuvre française et allemande s’est resserré en  2017. La convergence des économies européennes prendra encore du temps : en 2017, le coût d’un salarié a varié de 1 à 10 au sein l’Union européenne, selon les chiffres publiés, lundi 9 avril, par Eurostat. Dans le détail, les coûts horaires de la main-d’œuvre dans l’économie marchande s’établissent à 4,90 euros en Bulgarie et à 43,60 euros au Danemark. Entre ces deux extrêmes, ils sont de 36,60 euros en France, 34,60 euros en Allemagne, 27,30 euros en Italie ou 14,20 euros en Grèce. Dans l’ensemble, les coûts horaires de la main-d’œuvre, qui comprennent les rémunérations (salaires, primes) et les coûts non salariaux tels que les cotisations sociales patronales, ont progressé de 1,9 % dans la zone euro en 2017, après 1,4 % en 2016. Des chiffres à manipuler avec précaution. « Ils ne donnent qu’une vue partielle des évolutions salariales et ne disent rien de la compétitivité hors coût, relative à l’innovation et à la qualité », souligne Etienne Lehmann, économiste à Paris-II-Panthéon-Assas.

Ces chiffres reflètent aussi les différents choix de modèle social. La France est la championne des coûts non salariaux (32,8 % du total des coûts de la main-d’œuvre), car le financement de notre protection sociale repose surtout sur les cotisations. Au Danemark, où ce dernier dépend essentiellement de l’impôt, la part des coûts non salariaux est de 13,8 % seulement.


ECes précautions prises en compte, les statistiques d’Eurostat éclairent les trajectoires économiques des pays de l’UE ces dernières années. « Sans surprise, le coût du travail stagne depuis 2012 en Italie et en Espagne : le taux de chômage élevé et l’austérité ont pesé sur les salaires », illustre Xavier Timbeau, directeur de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Le même constat est valable en Grèce et au Portugal. En Allemagne, au quasi-plein-emploi depuis deux ans, le coût horaire a en revanche progressé de 11,8 % entre 2012 et 2017 dans le secteur marchand, contre 5,6 % en France, selon les calculs de l’institut de conjoncture Coe-Rexecode, proche du patronat.

Dynamisme des rémunérations en Europe centrale et de l’Est Cela tient à la revalorisation du salaire minimum allemand, entrée en vigueur début 2017, et aux augmentations négociées par le syndicat IG Metall. Mais pas seulement. « En France, l’instauration du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi [CICE] et du pacte de responsabilité ont contribué à modérer la hausse des coûts non salariaux dès 2014 », explique Denis Ferrand, directeur général de Coe-Rexecode. Du coup, l’écart entre le coût de la main-d’œuvre français et allemand (secteur marchand) s’est resserré : il était de 2 euros en 2017 contre 3,90 euros en 2012. Mieux : dans l’industrie, le coût horaire est moins élevé de ce côté-ci du Rhin depuis 2015. L’an passé, il était de 38,80 euros chez nous, contre 40,20 euros chez nos voisins.

Mais cela pourrait ne pas durer : le dispositif du CICE, qui se transformera en baisse de charges durable pour les entreprises dès 2019, est un peu moins généreux pour les employeurs tricolores depuis le 1er janvier. Cela devrait se traduire par une légère remontée du coût du travail. « Peut-être, mais la véritable question est de comprendre pourquoi la modération des deux dernières années en France ne s’est pas encore traduite par des gains de parts de marché à l’étranger », souligne M. Timbeau. Probablement parce que la compétitivité de nos produits à l’exportation ne dépend pas seulement du coût du travail…

Au reste, les chiffres d’Eurostat confirment une autre évolution notable : le dynamisme des rémunérations en Europe centrale et de l’Est, en partie lié au rattrapage de ces économies. Le coût horaire de la main-d’œuvre a bondi de 17,1 % en Roumanie l’an passé, de 12 % en Bulgarie, de 9,2 % en Hongrie et de 8,4 % en République tchèque. Une bonne nouvelle pour le pouvoir d’achat des salariés. Mais la pénurie de main-d’œuvre dans ces pays commence à inquiéter les entreprises locales. « Si elles se poursuivent, ces fortes hausses de salaires pourraient également poser question pour les groupes occidentaux qui ont délocalisé des activités vers l’Est pour des raisons de coût », souligne Denis Ferrand.