Ventes d'œuvres le 1777.-.-

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  • 1777.-.-/ -. Vente de l'œuvre décrite comme [[La Sépulture. L'Auteur de cet excellent ouvrage a fait choix, comme nous l'avons déjà dit, du moment que Joseph d'Arimathie ayant fait détacher de la croix le corps de Jesus-Christ, le laisse voir pendant quelques tems aux principales personnes qui avoient aimé le Sauveur pendant sa vie. La situation du lieu, qui est plein de rochers, fait juger que la scène de ce qui se passe ici n'est pas loin de l'endroit que l'on avoit destiné pour la sépulture. Le Christ, la Vierge, sa Mere, s. Jean & les trois Maries, trois Anges, Joseph d'Arimathie, Nicodême, & le Centenier qui reconnut la divinité de Jesus-Christ incontinent après sa mort, sont la composition de cette Histoire. Le Christ est placé au milieu de la scène, étendu négligemment, mais naturellement, sur une pierre couverte d'un linceuil, & dans une disposition convenable à un corps qui n'a plus de mouvement, mais qui se trouve tourné, comme par hasard, à émouvoir jusqu'aux larmes, la compassion du spectateur. La figure est d'une proportion si noble & si délicate, qu'en la voyant, on est aisément porté à croire qu'il y a sous ces apparences, quelque chose de divin. La Vierge est auprès de ce corps : elle en a appuyé la tête sur ses genoux pour le mieux contempler. Elle a le corps plié, & les bras élevés, en action d'exprimer sa tendresse, & tout ce qu'elle sent sur l'état où elle voit son Fils & son Dieu. Les saintes Femmes qui accompagnoient la Vierge, le coeur rempli de douleur, font voir, chacune à sa maniere, ce que peut la compassion à la vue d'un spectacle si touchant. Les notions qu'avoient ces saintes femmes de la divinité de Jesus-Christ, pouvoient bien mettre le calme dans leurs esprits, & effacer totues les marques de leur affliction ; mais l'amour qu'elles avoient pour leur Maître, les outrages auxquels elles l'avoient vu exposé pendant sa vie, le supplice honteux de sa mort, ne leur permettoient pas d'oublier entiérement les oppropres qu'il venoit tout récemment de souffrir à leurs yeux. Il est vrai que Jesus-Christ leur avoit parlé de la nécessité de ses souffrances, & de sa prochaine Résurrection ; mais tout ce qui put faire l'espérance de voir arriver bientôt la Résurrection, fut d'adoucir les transports démesurés auxquels une tristesse extrême nous conduit ordinairement. On ne verra donc point ici l'expression extérieure du dernier abandon à la douleur, on y observera seulement toutes les marques d'un coeur qui, dans l'excès de son amour, est à la vérité fort sensible au triomphe prochain de Jesus-Christ ; mais qui est encore plus occupé du souvenir de ses souffrances. Saint Jean, placé du côté gauche, appuyé sur un rocher, dans une attitude abattue, tient les clous qui ont attaché son Maître à la Croix, & paroît faire ses réflexions sur les douleurs dont ils ont été les instrumens. L'Auteur a placé la Magdelène du même côté aux pieds du Christ : elle les baise avec amour, & semble les baigner de ses larmes qu'elle est prête d'essuyer de ses cheveux épars, comme elle fit dans la maison de Simon le Pharisien. Les deux autres femmes sont, l'une à genoux, près de la Vierge, & l'autre debout : celle-ci a le corps penché, & la tête gracieusement inclinée sur l'épaule, comme pour essuyer ses larmes avec le linge qui lui sert de voile. Ces deux femmes expriment fortement, & sans aucun mouvement exagéré, le mélange de douleur & de tendresse dont leur coeur est pénétré. Les deux vieillards qui sont derriere ces femmes, au coin de la composition, dont l'un paroît être Nicodême, & l'autre le Centenier qui reconnut la Divinité de Jesus-Christ incontinent après sa mort, s'entretiennent assez vivement de la maniere injuste dont les Juifs avoient condamné l'innocence même. Joseph d'Arimathie, un peu plus avancé sur le devant, & debout, une main sur la hanche, &l'autre sur la poitrine, dans une attitude majestueuse, les yeux tournés vers le Christ, fait attention à ce qu'il voit ; mais on juge facilement, par toute son action, qu'il est encore plus occupé de la Foi qu'il a reçue, & de la grandeur du Mystère de la Rédemption. Le goût du Dessin, dans cette Histoire, est merveilleusement convenable aux figures qui la composent ; il est svelte, élégant, & noble dans le Christ & dans les femmes ; il est plus fort & plus prononcé dans les trois hommes qui sont plus avancés en âge : il s'y trouve diversement selon la diversité qui se voit ordinairement dans la Nature. Car, pour S. Jean, son caractère de dessin est entre la délicatesse du Christ, & la proportion plus pesante des trois autres figures dont je viens de parler. Cependant toutes les proportions sont observées, dans leur genre, avec toute la justesse que l'on peut attendre de l'Art. Trois Anges sont en l'air au-dessus du Christ, & composent un grouppe agréablement varié par leurs attitudes contractées, & par la diversité de leurs expressions & de leurs coloris. Ils sont, dans leur caractère d'enfans, dessinés comme les femmes ; c'est-à-dire, de la même délicatesse. Quelque difficile que soit la pratique du coloris dans la Sculpture, il est étonnant que l'Auteur s'en soit acquitté, comme il a fait, avec un heureux succès. Les carnations y sont variées avec tant de ménagement & d'intelligence, que dans la justesse qui leur convient, il y a une finesse d'opposition & de différence qu'on ne peut assez admirer. Notre ingénieux Sculpteur ne s'est pas contenté des couleurs locales, c'est-à-dire, de celles qui conviennent à chaque chose en particulier. Il a encore cherché, comme un Peintre habile, à faire valoir la couleur d'un objet par l'opposition de la couleur d'un autre objet. Le linceul, par exemple, qui est sous le corps du Christ, donne à sa carnation un plus grand caractère de vérité par la comparaison de ces deux couleurs. L'Auteur voulant attirer sur le Christ les yeux du spectateur, comme sur l'objet le plus important, s'est servi d'un brun doux, dont il a habillé la Vierge & la Magdelène, pour rendre la lumiere qui est sur le Christ, plus vive & plus sensible. La femme qui est à genoux entre la Vierge & l'autre Marie, ne contribue pas peu à l'effet du clair obscur, en distinguant, par son obscurité, les figures qu'elle sépare. La couleur des vêtemens de Nicodême, & du Centenier, détachent & poussent en devant, comme de concert, la figure qui leur est proche, & Joseph d'Arimathie est habillé d'une pourpre qui non-seulement désigne une personne de qualité, mais qui, selon les règles de l'Art, étant d'un ton fort & vigoureux, convient aux figures que l'on veut mettre sur le devant, & contribue, dans l'assemblage des couleurs, à l'harmonie du tout ensemble. Mais ce n'est pas seulement par la couleur de son habit, que cette figure est plus sensible que les autres, l'ouvrage de la tête est un chef-d'oeuvre de l'Art. C'est un vieillard dont le visage est couvert de rides, mais de rides savantes par la maniere dont elles sont placées, & dont elles sont exécutées ; car elles expriment la physionomie d'un homme de bon esprit, & imitent la nature de ce caractere d'une maniere la plus forte, la plus tendre, & la plus accomplie. Mais quoique cette tête soit travaillée dans la dernière exactitude, elle ne sent point du tout la peine : le travail y est tout spirituel, il y coule de source, & la patience qu'il a exigée est plutôt l'effet du plaisir que l'Auteur y a pris, que de la nécessité de le terminer. Tout est donc fini dans cette figure particuliere ; mais tout y est de feu, & l'adresse de la main, soutenue de la force d'un beau génie, & d'une science profonde, ont rendu cet ouvrage digne, certes, de la plus grande admiration. C'est ainsi que notre savant Sculpteur, en joignant à ce triste sujet toutes les graces dont il est susceptible,& en répandant d'ailleurs toutes les marques d'une science aussi profonde qu'ingénieuse, a consacré cet ouvrage à la postérité. Mais quelque soin que l'on ait pris de rendre fidèles ces deux descriptions, il est impossible, en les lisant seulement sans voir les ouvrages même, de se faire une idée bien juste de toute leur beauté. Extrait de la Vie de M. l'Abbé Zumbo, tiré du grand Dictionnaire historique de Moréry, édition de Paris, 1759, page 64 du Supplément du dixieme Volume. Gaston-Jean Zumbo, Gentilhomme Sicilien, homme rare dans son temps, naquit à Syracuse l'an 1656, peu favorisé des biens de la fortune ; mais doué d'un prodigieux génie pour les beaux Arts, particulierement pour la Sculpture à laquelle il s'attacha. La vue continuelle des Antiques & des rares Peintures qui sont à Rome, & dans toute l'Italie, échauffa cette disposition qu'il avoit à imiter ce que la Nature produit de plus parfait : de sorte qu'avec le secours de l'Anatomie, qu'il apprit avec plus de précision qu'il n'est même nécessaire à la Sculpture, il se rendit, sans avoir d'autre Maître que son propre génie, l'un des premiers hommes qui aient jamais paru en cet Art. Il ne se servit, dans tous ses ouvrages, d'autre matiere que d'une cire colorée, qu'il préparoit pourtant d'une maniere particuliere. Ce secret, à la vérité, ne lui fut pas particulier, Warin & le Bel l'avoit eu avant lui ; mais les morceaux qu'il fit avec cette matiere excellerent sur tous les autres en ce genre, par leur perfection. Le Grand Duc de Toscane, qui avoit sçu les applaudissemens que Zumbo avoit eus à Bologne, fut ravi de le voir arriver à Florence ; &, charmé d'un mérite si rare, il crut se l'attacher par une pension considérable, & par d'autres marques d'une distinction particuliere. Pendant le temps qu'il fut à ce Prince, il fit pour lui, avec sa cire colorée, deux Sujets de cinq ou six figures chacun, & deux pour le Prince Ferdinand. Parmi ces quatre Sujets, il y en a un d'une idée particuliere, & qui demande dans le Sculpteur une force surprenante d'imagination : c'est ce qu'il appelle la Corruzione. Ce sont des figures colorées au naturel, qui représentent un homme mourant, un corps mort, un qui commence à se corrompre, un autre corrompu ; & enfin un cadavre plein de pourriture, & mangé des vers, que l'on ne sauroit regarder sans être saisi d'une espece d'horreur, tant l'ingénieux Scultpeur y a sçu mettre de vérité. Ces ouvrages frapperent si fort le Grand Duc, qu'il les jugea dignes de tenir leur rang dans son superbe Cabinet, parmi les Statues antiques & les plus rares Tableaux qu'il possédoit. Après quelques années de séjour à Florence, Zumbo crut qu'il n'y avoit que la France qui fût digne d'attacher sa fortune : ainsi il demanda son congé au Grand Duc qui, n'ayant pu le dissuader de ce voyage, lui dit obligeamment en le congédiant : « Vous pouvez trouver un Maître plus grand que moi, mais jamais personne qui sache mieux que moi ce que vous valez ». Les bienfaits, l'estime de ce Prince, & tous les agrémens que Zumbo avoit à sa Cour, ne purent l'y retenir. Il passa donc à Gênes où il employa quatre à cinq années à travailler une Nativité du Sauveur, & une Descente de Croix, qu'on peut dire ses chef-d'oeuvres. Il s'associa, en cette ville, avec un Chirurgien François, nommé Desnoues, à dessein de représenter, avec sa cire colorée, des corps anatomiques : le chirurgien disséquoit, & le savant Sculpteur représentoit. Son plus beau morceau, dans ce genre, fut un corps de femme avec son enfant, qui parut avec tant de vérité, & des couleurs si naturelles, que les spectateurs les plus habiles y furent trompés : l'ouvrage étoit sur sa fin, lorsque des raisons d'intérêt brouillerent les deux associés. Ainsi Zumbo piqué, abandonna son Chirurgien à qui le corps resta, & passa en France. Arrivé à Marseille, il y montra ses deux merveilleux ouvrages de la Nativité & de la Descente de Croix, dont M. de Montmort, Intendant des Galeres, fut si étonné, qu'il en écrivit en Cour. Il reçut ordre d'y envoyer cet Etranger. Pendant que cela se préparoit, Zumbo voulut aussi porter à Paris quelque morceau semblable à ce qu'il avoit fait en anatomie à Gênes. M. l'Intendant lui donna un jeune Chirurgien, Galérien, pour l'aider ; & il lui fit disséquer plusieurs têtes que l'Hôpital de Marseille eut ordre de lui fournir. Ce fut sur ces têtes naturelles qu'il forma une belle tête anatomique, que l'Académie des Sciences approuva, avec les éloges que l'on voit dans l'Histoire de l'Académie, de l'année 1701. Les plus curieux voulurent la voir ; & Philippe, petit-fils de France, Duc d'Orléans, Prince plein de bon goût pour toutes choses, ne dédaigna pas d'aller chez Zumbo examiner à loisir cet ouvrage ; mais, peu après, cet homme merveilleux trouva son tombeau où il croyoit trouver son triomphe, & au milieu des applaudissemens de tout ce qu'il y avoit de Grand & d'illustre à Paris : la mort l'enleva à la fortune au mois d'Octobre 1701. On a souvent ouï dire à l'Abbé Zumbo, Auteur de ces deux Ouvrages, dont l'un représente la Nativité, & l'autre la Sépulture de Jesus-Christ, qu'il a voulu représenter ces deux Sujets, pour avoir occasion d'exprimer deux passions contraires, la joie & la tristesse. C'est pour cela qu'il a choisi, dans l'Histoire de la Nativité, l'arrivée des Pasteurs lorsqu'ils viennent reconnoître & adorer le Sauveur qui, selon les paroles de l'Ange, devoit être, à tout le monde, le sujet d'une grande joie. Dans l'Histoire de la Sépulture, il s'est attaché à représenter le moment où Joseph d'Arimathie, ayant obtenu le Corps de Jesus-Christ, la Vierge & les saintes femmes qui l'accompagnoient, donnent des marques de leur douleur. Et comme ce génie heureux a bien senti que la couleur releveroit infiniment son ouvrage, & qu'elle feroit valoir ses expressions, il s'est servi du coloris pour mettre le vrai dans ses carnations & dans ses draperies. Cette Description est de M. de Pilles : elle se trouve dans son Cours de Peinture par Principes, édition de Paris, 1708, page 473. (Zumbo)|La Sépulture. L'Auteur de cet excellent ouvrage a fait choix, comme nous l'avons déjà dit, du moment que Joseph d'Arimathie ayant fait détacher de la croix le corps de Jesus-Christ, le laisse voir pendant quelques tems aux principales personnes qui avoient aimé le Sauveur pendant sa vie. La situation du lieu, qui est plein de rochers, fait juger que la scène de ce qui se passe ici n'est pas loin de l'endroit que l'on avoit destiné pour la sépulture. Le Christ, la Vierge, sa Mere, s. Jean & les trois Maries, trois Anges, Joseph d'Arimathie, Nicodême, & le Centenier qui reconnut la divinité de Jesus-Christ incontinent après sa mort, sont la composition de cette Histoire. Le Christ est placé au milieu de la scène, étendu négligemment, mais naturellement, sur une pierre couverte d'un linceuil, & dans une disposition convenable à un corps qui n'a plus de mouvement, mais qui se trouve tourné, comme par hasard, à émouvoir jusqu'aux larmes, la compassion du spectateur. La figure est d'une proportion si noble & si délicate, qu'en la voyant, on est aisément porté à croire qu'il y a sous ces apparences, quelque chose de divin. La Vierge est auprès de ce corps : elle en a appuyé la tête sur ses genoux pour le mieux contempler. Elle a le corps plié, & les bras élevés, en action d'exprimer sa tendresse, & tout ce qu'elle sent sur l'état où elle voit son Fils & son Dieu. Les saintes Femmes qui accompagnoient la Vierge, le coeur rempli de douleur, font voir, chacune à sa maniere, ce que peut la compassion à la vue d'un spectacle si touchant. Les notions qu'avoient ces saintes femmes de la divinité de Jesus-Christ, pouvoient bien mettre le calme dans leurs esprits, & effacer totues les marques de leur affliction ; mais l'amour qu'elles avoient pour leur Maître, les outrages auxquels elles l'avoient vu exposé pendant sa vie, le supplice honteux de sa mort, ne leur permettoient pas d'oublier entiérement les oppropres qu'il venoit tout récemment de souffrir à leurs yeux. Il est vrai que Jesus-Christ leur avoit parlé de la nécessité de ses souffrances, & de sa prochaine Résurrection ; mais tout ce qui put faire l'espérance de voir arriver bientôt la Résurrection, fut d'adoucir les transports démesurés auxquels une tristesse extrême nous conduit ordinairement. On ne verra donc point ici l'expression extérieure du dernier abandon à la douleur, on y observera seulement toutes les marques d'un coeur qui, dans l'excès de son amour, est à la vérité fort sensible au triomphe prochain de Jesus-Christ ; mais qui est encore plus occupé du souvenir de ses souffrances. Saint Jean, placé du côté gauche, appuyé sur un rocher, dans une attitude abattue, tient les clous qui ont attaché son Maître à la Croix, & paroît faire ses réflexions sur les douleurs dont ils ont été les instrumens. L'Auteur a placé la Magdelène du même côté aux pieds du Christ : elle les baise avec amour, & semble les baigner de ses larmes qu'elle est prête d'essuyer de ses cheveux épars, comme elle fit dans la maison de Simon le Pharisien. Les deux autres femmes sont, l'une à genoux, près de la Vierge, & l'autre debout : celle-ci a le corps penché, & la tête gracieusement inclinée sur l'épaule, comme pour essuyer ses larmes avec le linge qui lui sert de voile. Ces deux femmes expriment fortement, & sans aucun mouvement exagéré, le mélange de douleur & de tendresse dont leur coeur est pénétré. Les deux vieillards qui sont derriere ces femmes, au coin de la composition, dont l'un paroît être Nicodême, & l'autre le Centenier qui reconnut la Divinité de Jesus-Christ incontinent après sa mort, s'entretiennent assez vivement de la maniere injuste dont les Juifs avoient condamné l'innocence même. Joseph d'Arimathie, un peu plus avancé sur le devant, & debout, une main sur la hanche, &l'autre sur la poitrine, dans une attitude majestueuse, les yeux tournés vers le Christ, fait attention à ce qu'il voit ; mais on juge facilement, par toute son action, qu'il est encore plus occupé de la Foi qu'il a reçue, & de la grandeur du Mystère de la Rédemption. Le goût du Dessin, dans cette Histoire, est merveilleusement convenable aux figures qui la composent ; il est svelte, élégant, & noble dans le Christ & dans les femmes ; il est plus fort & plus prononcé dans les trois hommes qui sont plus avancés en âge : il s'y trouve diversement selon la diversité qui se voit ordinairement dans la Nature. Car, pour S. Jean, son caractère de dessin est entre la délicatesse du Christ, & la proportion plus pesante des trois autres figures dont je viens de parler. Cependant toutes les proportions sont observées, dans leur genre, avec toute la justesse que l'on peut attendre de l'Art. Trois Anges sont en l'air au-dessus du Christ, & composent un grouppe agréablement varié par leurs attitudes contractées, & par la diversité de leurs expressions & de leurs coloris. Ils sont, dans leur caractère d'enfans, dessinés comme les femmes ; c'est-à-dire, de la même délicatesse. Quelque difficile que soit la pratique du coloris dans la Sculpture, il est étonnant que l'Auteur s'en soit acquitté, comme il a fait, avec un heureux succès. Les carnations y sont variées avec tant de ménagement & d'intelligence, que dans la justesse qui leur convient, il y a une finesse d'opposition & de différence qu'on ne peut assez admirer. Notre ingénieux Sculpteur ne s'est pas contenté des couleurs locales, c'est-à-dire, de celles qui conviennent à chaque chose en particulier. Il a encore cherché, comme un Peintre habile, à faire valoir la couleur d'un objet par l'opposition de la couleur d'un autre objet. Le linceul, par exemple, qui est sous le corps du Christ, donne à sa carnation un plus grand caractère de vérité par la comparaison de ces deux couleurs. L'Auteur voulant attirer sur le Christ les yeux du spectateur, comme sur l'objet le plus important, s'est servi d'un brun doux, dont il a habillé la Vierge & la Magdelène, pour rendre la lumiere qui est sur le Christ, plus vive & plus sensible. La femme qui est à genoux entre la Vierge & l'autre Marie, ne contribue pas peu à l'effet du clair obscur, en distinguant, par son obscurité, les figures qu'elle sépare. La couleur des vêtemens de Nicodême, & du Centenier, détachent & poussent en devant, comme de concert, la figure qui leur est proche, & Joseph d'Arimathie est habillé d'une pourpre qui non-seulement désigne une personne de qualité, mais qui, selon les règles de l'Art, étant d'un ton fort & vigoureux, convient aux figures que l'on veut mettre sur le devant, & contribue, dans l'assemblage des couleurs, à l'harmonie du tout ensemble. Mais ce n'est pas seulement par la couleur de son habit, que cette figure est plus sensible que les autres, l'ouvrage de la tête est un chef-d'oeuvre de l'Art. C'est un vieillard dont le visage est couvert de rides, mais de rides savantes par la maniere dont elles sont placées, & dont elles sont exécutées ; car elles expriment la physionomie d'un homme de bon esprit, & imitent la nature de ce caractere d'une maniere la plus forte, la plus tendre, & la plus accomplie. Mais quoique cette tête soit travaillée dans la dernière exactitude, elle ne sent point du tout la peine : le travail y est tout spirituel, il y coule de source, & la patience qu'il a exigée est plutôt l'effet du plaisir que l'Auteur y a pris, que de la nécessité de le terminer. Tout est donc fini dans cette figure particuliere ; mais tout y est de feu, & l'adresse de la main, soutenue de la force d'un beau génie, & d'une science profonde, ont rendu cet ouvrage digne, certes, de la plus grande admiration. C'est ainsi que notre savant Sculpteur, en joignant à ce triste sujet toutes les graces dont il est susceptible,& en répandant d'ailleurs toutes les marques d'une science aussi profonde qu'ingénieuse, a consacré cet ouvrage à la postérité. Mais quelque soin que l'on ait pris de rendre fidèles ces deux descriptions, il est impossible, en les lisant seulement sans voir les ouvrages même, de se faire une idée bien juste de toute leur beauté. Extrait de la Vie de M. l'Abbé Zumbo, tiré du grand Dictionnaire historique de Moréry, édition de Paris, 1759, page 64 du Supplément du dixieme Volume. Gaston-Jean Zumbo, Gentilhomme Sicilien, homme rare dans son temps, naquit à Syracuse l'an 1656, peu favorisé des biens de la fortune ; mais doué d'un prodigieux génie pour les beaux Arts, particulierement pour la Sculpture à laquelle il s'attacha. La vue continuelle des Antiques & des rares Peintures qui sont à Rome, & dans toute l'Italie, échauffa cette disposition qu'il avoit à imiter ce que la Nature produit de plus parfait : de sorte qu'avec le secours de l'Anatomie, qu'il apprit avec plus de précision qu'il n'est même nécessaire à la Sculpture, il se rendit, sans avoir d'autre Maître que son propre génie, l'un des premiers hommes qui aient jamais paru en cet Art. Il ne se servit, dans tous ses ouvrages, d'autre matiere que d'une cire colorée, qu'il préparoit pourtant d'une maniere particuliere. Ce secret, à la vérité, ne lui fut pas particulier, Warin & le Bel l'avoit eu avant lui ; mais les morceaux qu'il fit avec cette matiere excellerent sur tous les autres en ce genre, par leur perfection. Le Grand Duc de Toscane, qui avoit sçu les applaudissemens que Zumbo avoit eus à Bologne, fut ravi de le voir arriver à Florence ; &, charmé d'un mérite si rare, il crut se l'attacher par une pension considérable, & par d'autres marques d'une distinction particuliere. Pendant le temps qu'il fut à ce Prince, il fit pour lui, avec sa cire colorée, deux Sujets de cinq ou six figures chacun, & deux pour le Prince Ferdinand. Parmi ces quatre Sujets, il y en a un d'une idée particuliere, & qui demande dans le Sculpteur une force surprenante d'imagination : c'est ce qu'il appelle la Corruzione. Ce sont des figures colorées au naturel, qui représentent un homme mourant, un corps mort, un qui commence à se corrompre, un autre corrompu ; & enfin un cadavre plein de pourriture, & mangé des vers, que l'on ne sauroit regarder sans être saisi d'une espece d'horreur, tant l'ingénieux Scultpeur y a sçu mettre de vérité. Ces ouvrages frapperent si fort le Grand Duc, qu'il les jugea dignes de tenir leur rang dans son superbe Cabinet, parmi les Statues antiques & les plus rares Tableaux qu'il possédoit. Après quelques années de séjour à Florence, Zumbo crut qu'il n'y avoit que la France qui fût digne d'attacher sa fortune : ainsi il demanda son congé au Grand Duc qui, n'ayant pu le dissuader de ce voyage, lui dit obligeamment en le congédiant : « Vous pouvez trouver un Maître plus grand que moi, mais jamais personne qui sache mieux que moi ce que vous valez ». Les bienfaits, l'estime de ce Prince, & tous les agrémens que Zumbo avoit à sa Cour, ne purent l'y retenir. Il passa donc à Gênes où il employa quatre à cinq années à travailler une Nativité du Sauveur, & une Descente de Croix, qu'on peut dire ses chef-d'oeuvres. Il s'associa, en cette ville, avec un Chirurgien François, nommé Desnoues, à dessein de représenter, avec sa cire colorée, des corps anatomiques : le chirurgien disséquoit, & le savant Sculpteur représentoit. Son plus beau morceau, dans ce genre, fut un corps de femme avec son enfant, qui parut avec tant de vérité, & des couleurs si naturelles, que les spectateurs les plus habiles y furent trompés : l'ouvrage étoit sur sa fin, lorsque des raisons d'intérêt brouillerent les deux associés. Ainsi Zumbo piqué, abandonna son Chirurgien à qui le corps resta, & passa en France. Arrivé à Marseille, il y montra ses deux merveilleux ouvrages de la Nativité & de la Descente de Croix, dont M. de Montmort, Intendant des Galeres, fut si étonné, qu'il en écrivit en Cour. Il reçut ordre d'y envoyer cet Etranger. Pendant que cela se préparoit, Zumbo voulut aussi porter à Paris quelque morceau semblable à ce qu'il avoit fait en anatomie à Gênes. M. l'Intendant lui donna un jeune Chirurgien, Galérien, pour l'aider ; & il lui fit disséquer plusieurs têtes que l'Hôpital de Marseille eut ordre de lui fournir. Ce fut sur ces têtes naturelles qu'il forma une belle tête anatomique, que l'Académie des Sciences approuva, avec les éloges que l'on voit dans l'Histoire de l'Académie, de l'année 1701. Les plus curieux voulurent la voir ; & Philippe, petit-fils de France, Duc d'Orléans, Prince plein de bon goût pour toutes choses, ne dédaigna pas d'aller chez Zumbo examiner à loisir cet ouvrage ; mais, peu après, cet homme merveilleux trouva son tombeau où il croyoit trouver son triomphe, & au milieu des applaudissemens de tout ce qu'il y avoit de Grand & d'illustre à Paris : la mort l'enleva à la fortune au mois d'Octobre 1701. On a souvent ouï dire à l'Abbé Zumbo, Auteur de ces deux Ouvrages, dont l'un représente la Nativité, & l'autre la Sépulture de Jesus-Christ, qu'il a voulu représenter ces deux Sujets, pour avoir occasion d'exprimer deux passions contraires, la joie & la tristesse. C'est pour cela qu'il a choisi, dans l'Histoire de la Nativité, l'arrivée des Pasteurs lorsqu'ils viennent reconnoître & adorer le Sauveur qui, selon les paroles de l'Ange, devoit être, à tout le monde, le sujet d'une grande joie. Dans l'Histoire de la Sépulture, il s'est attaché à représenter le moment où Joseph d'Arimathie, ayant obtenu le Corps de Jesus-Christ, la Vierge & les saintes femmes qui l'accompagnoient, donnent des marques de leur douleur. Et comme ce génie heureux a bien senti que la couleur releveroit infiniment son ouvrage, & qu'elle feroit valoir ses expressions, il s'est servi du coloris pour mettre le vrai dans ses carnations & dans ses draperies. Cette Description est de M. de Pilles : elle se trouve dans son Cours de Peinture par Principes, édition de Paris, 1708, page 473.]] réalisée par Zumbo, vendue par Le Hay. [1]
  • 1777.-.-/ -. Vente de l'œuvre décrite comme [[La Nativité. Pour suivre le texte de l'Evangile, l'Auteur a mis la scène de son Sujet dans un lieu dénué de toutes choses, & qui paroît, par les ruines qui en restent, avoir été autrefois un Temple d'Idoles ; mais qui ne peut plus servir que de retraites aux animaux, & tout au plus d'une étable abandonnée au premier venu. L'Auteur, dans sa composition, a voulu faire entrer des restes de magnificence pour rendre plus sensible, par cette opposition, la pauvreté de Jesus-Christ, & pour établir, sur les débris de l'idolatrie, la Religion Chrétienne. Il a considéré de plus, que pour contribuer à la joie qu'il vouloit exprimer, il pouvoit, sans détruire l'idée de la pauvreté du lieu, y introduire quelque ouvrage de Sculpture antique, & par-là réveiller le goût de son spectateur, & le plaisir que donne aux connoisseurs la vue de ces précieux restes. Ajoutez que comme il n'y a rien de plus humble, ni de plus grand que la Naissance du Fils de Dieu, l'Auteur y a voulu faire allusion en mêlant la destruction d'un bâtiment magnifique avec la beauté de quelques restes qui en faisoient partie. Notre illustre Sculpteur a fait entrer dans son sujet vingt-quatre figures, & six animaux de differentes especes. Il a placé la Vierge avec son Fils au milieu de la composition : elle y paroît d'un caractere modeste, mais d'un agrément infini ; & le Christ, en conservant la figure d'un enfant nouveau-né, fait concevoir en son action quelque chose de plus qu'humain. On remarque une grande variété dans les figures de cette Histoire, par la différence des physionomies, des caractères, des sexes, des âges, des attitudes, & des expressions. Quatre Bergers sont attentifs à considérer de près l'Enfant & la Mere que l'Ange leur avoit indiqués. A côté droit, quatre autres sont autour de Saint Joseph qui leur explique le Mystère dont ils sont témoins. Ces Bergers font voir, en différentes manieres, les effets de la grace, en exprimant la joie que leur cause cette instruction. D'autres plus craintifs, qui sont sur le devant de la composition de cet ouvrage, adorent de plus loin le Sauveur qui leur étoit né. A côté gauche, quelques Bergers s'entretiennent de ce qu'ils voient. Il y en a un entr'autres, qui paroît appeler les plus éloignés, & qui les incite à se hâter pour jouir de la nouveauté du spectacle. L'Auteur a fait entrer dans la composition de son sujet, quatre Anges qui sont en l'air au-dessus du Christ & de la Vierge, supposant qu'ils sont envoyés de la Cour céleste, pour faire reconnoître aux Pasteurs leur divin Maître, & pour l'adorer avec eux. Les ajustemens, les draperies, les coëffures, & tout ce qui accompagne les figures, leur convient si parfaitement, que ceux qui en voudront examiner le détail, en admireront la diversité & la vraisemblance. Les expressions sur-tout en sont si vives, qu'on est forcé d'y entrer par l'impression qu'elles font sur les esprits, lorsqu'on y veut faire quelque attention : l'un y exprime l'admiration, l'autre la simplicité ; l'un la surprise, l'autre la dévotion ; & chaque objet marque parfaitement le choix d'un beau caractère. Les figures y sont dessinées d'une exacte justesse, d'un goût grand, & d'une maniere convenable à leur qualité. On y peut admirer la tendresse des carnations, les beaux plis des draperies, la vérité & le contaste des attitudes, la disposition des grouppes, & la dégradation des terreins. Tout est extrêmement fini dans cet ouvrage, & il n'y a pas jusqu'aux plantes & autres minuties, dont l'exacte vérité ne fasse plaisir. Les couleurs même, qui sont d'ordinaire peu convenables à la Sculpture, y sont ménagées avec une certaine modération qui jette le tout dans une plus grande vraisemblance, & entr'autres, dans les statues qui sont si bien imitées d'un vieux marbre tout taché, & tout altéré par le temps, que l'oeil y est trompé. Enfin toutes ces choses ensemble sont une merveilleuse harmonie, & concourent à exprimer le sujet avec tout l'agrément imaginable. On a souvent ouï dire à l'Abbé Zumbo, Auteur de ces deux Ouvrages, dont l'un représente la Nativité, & l'autre la Sépulture de Jesus-Christ, qu'il a voulu représenter ces deux Sujets, pour avoir occasion d'exprimer deux passions contraires, la joie & la tristesse. C'est pour cela qu'il a choisi, dans l'Histoire de la Nativité, l'arrivée des Pasteurs lorsqu'ils viennent reconnoître & adorer le Sauveur qui, selon les paroles de l'Ange, devoit être, à tout le monde, le sujet d'une grande joie. Dans l'Histoire de la Sépulture, il s'est attaché à représenter le moment où Joseph d'Arimathie, ayant obtenu le Corps de Jesus-Christ, la Vierge & les saintes femmes qui l'accompagnoient, donnent des marques de leur douleur. Et comme ce génie heureux a bien senti que la couleur releveroit infiniment son ouvrage, & qu'elle feroit valoir ses expressions, il s'est servi du coloris pour mettre le vrai dans ses carnations & dans ses draperies. Cette Description est de M. de Pilles : elle se trouve dans son Cours de Peinture par Principes, édition de Paris, 1708, page 473. (Zumbo)|La Nativité. Pour suivre le texte de l'Evangile, l'Auteur a mis la scène de son Sujet dans un lieu dénué de toutes choses, & qui paroît, par les ruines qui en restent, avoir été autrefois un Temple d'Idoles ; mais qui ne peut plus servir que de retraites aux animaux, & tout au plus d'une étable abandonnée au premier venu. L'Auteur, dans sa composition, a voulu faire entrer des restes de magnificence pour rendre plus sensible, par cette opposition, la pauvreté de Jesus-Christ, & pour établir, sur les débris de l'idolatrie, la Religion Chrétienne. Il a considéré de plus, que pour contribuer à la joie qu'il vouloit exprimer, il pouvoit, sans détruire l'idée de la pauvreté du lieu, y introduire quelque ouvrage de Sculpture antique, & par-là réveiller le goût de son spectateur, & le plaisir que donne aux connoisseurs la vue de ces précieux restes. Ajoutez que comme il n'y a rien de plus humble, ni de plus grand que la Naissance du Fils de Dieu, l'Auteur y a voulu faire allusion en mêlant la destruction d'un bâtiment magnifique avec la beauté de quelques restes qui en faisoient partie. Notre illustre Sculpteur a fait entrer dans son sujet vingt-quatre figures, & six animaux de differentes especes. Il a placé la Vierge avec son Fils au milieu de la composition : elle y paroît d'un caractere modeste, mais d'un agrément infini ; & le Christ, en conservant la figure d'un enfant nouveau-né, fait concevoir en son action quelque chose de plus qu'humain. On remarque une grande variété dans les figures de cette Histoire, par la différence des physionomies, des caractères, des sexes, des âges, des attitudes, & des expressions. Quatre Bergers sont attentifs à considérer de près l'Enfant & la Mere que l'Ange leur avoit indiqués. A côté droit, quatre autres sont autour de Saint Joseph qui leur explique le Mystère dont ils sont témoins. Ces Bergers font voir, en différentes manieres, les effets de la grace, en exprimant la joie que leur cause cette instruction. D'autres plus craintifs, qui sont sur le devant de la composition de cet ouvrage, adorent de plus loin le Sauveur qui leur étoit né. A côté gauche, quelques Bergers s'entretiennent de ce qu'ils voient. Il y en a un entr'autres, qui paroît appeler les plus éloignés, & qui les incite à se hâter pour jouir de la nouveauté du spectacle. L'Auteur a fait entrer dans la composition de son sujet, quatre Anges qui sont en l'air au-dessus du Christ & de la Vierge, supposant qu'ils sont envoyés de la Cour céleste, pour faire reconnoître aux Pasteurs leur divin Maître, & pour l'adorer avec eux. Les ajustemens, les draperies, les coëffures, & tout ce qui accompagne les figures, leur convient si parfaitement, que ceux qui en voudront examiner le détail, en admireront la diversité & la vraisemblance. Les expressions sur-tout en sont si vives, qu'on est forcé d'y entrer par l'impression qu'elles font sur les esprits, lorsqu'on y veut faire quelque attention : l'un y exprime l'admiration, l'autre la simplicité ; l'un la surprise, l'autre la dévotion ; & chaque objet marque parfaitement le choix d'un beau caractère. Les figures y sont dessinées d'une exacte justesse, d'un goût grand, & d'une maniere convenable à leur qualité. On y peut admirer la tendresse des carnations, les beaux plis des draperies, la vérité & le contaste des attitudes, la disposition des grouppes, & la dégradation des terreins. Tout est extrêmement fini dans cet ouvrage, & il n'y a pas jusqu'aux plantes & autres minuties, dont l'exacte vérité ne fasse plaisir. Les couleurs même, qui sont d'ordinaire peu convenables à la Sculpture, y sont ménagées avec une certaine modération qui jette le tout dans une plus grande vraisemblance, & entr'autres, dans les statues qui sont si bien imitées d'un vieux marbre tout taché, & tout altéré par le temps, que l'oeil y est trompé. Enfin toutes ces choses ensemble sont une merveilleuse harmonie, & concourent à exprimer le sujet avec tout l'agrément imaginable. On a souvent ouï dire à l'Abbé Zumbo, Auteur de ces deux Ouvrages, dont l'un représente la Nativité, & l'autre la Sépulture de Jesus-Christ, qu'il a voulu représenter ces deux Sujets, pour avoir occasion d'exprimer deux passions contraires, la joie & la tristesse. C'est pour cela qu'il a choisi, dans l'Histoire de la Nativité, l'arrivée des Pasteurs lorsqu'ils viennent reconnoître & adorer le Sauveur qui, selon les paroles de l'Ange, devoit être, à tout le monde, le sujet d'une grande joie. Dans l'Histoire de la Sépulture, il s'est attaché à représenter le moment où Joseph d'Arimathie, ayant obtenu le Corps de Jesus-Christ, la Vierge & les saintes femmes qui l'accompagnoient, donnent des marques de leur douleur. Et comme ce génie heureux a bien senti que la couleur releveroit infiniment son ouvrage, & qu'elle feroit valoir ses expressions, il s'est servi du coloris pour mettre le vrai dans ses carnations & dans ses draperies. Cette Description est de M. de Pilles : elle se trouve dans son Cours de Peinture par Principes, édition de Paris, 1708, page 473.]] réalisée par Zumbo, vendue par Le Hay. [2]